Les forêts sèches en Nouvelle-Calédonie
Principaux sites
En Nouvelle-Calédonie, territoire mondialement reconnu pour son exceptionnelle biodiversité, la forêt sèche occupe une place discrète dans le paysage.
Fragmentée, elle forme des lambeaux isolés au milieu des pâturages, ou peu visibles face à l’étendue des espaces forestiers dégradés (fourrés à gaïacs, savanes à niaoulis…) qui l’entourent. La forêt sèche recèle pourtant une biodiversité élevée, son rôle écologique est important, elle est le lieu de vie d’une faune très variée, et joue un rôle de transition entre les forêts du littoral et les forêts humides de la chaîne centrale. La forêt sèche demeure néanmoins la formation végétale la plus directement menacée de disparition en Nouvelle-Calédonie.
Le terme forêt sèche, ou forêt sclérophylle, désigne un ensemble forestier qui se développe sous un climat sec, avec moins de 1 100 mm de pluie par an et une période de sécheresse souvent prolongée. En Nouvelle-Calédonie, c’est sur la côte Ouest, où les alizés soufflent et assèchent la terre et la végétation, que pousse la forêt sèche. Du littoral jusqu’à 500 m d’altitude, sur tous types de sols hors terrain ultramafique, la forêt sclérophylle, sans être très spectaculaire aux yeux non avertis, est un milieu d’une grande beauté lorsque l’on s’attache à sa découverte !
A la différence des formations mono-spécifiques (telles que les savanes à niaoulis et les fourrés à gaïacs), qui sont le signe d’une forêt dégradée, la forêt sèche présente une belle diversité de sa flore et de sa faune. A l’origine beaucoup plus étendue, il ne subsiste aujourd’hui plus que 17 855 ha* morcelés de l’extrême Nord au Sud-ouest de la Grande Terre, l’équivalent d’environ 3% seulement des forêts sclérophylles qui recouvraient initialement la Nouvelle-Calédonie.
* Selon les contours stricts des forêts sèches (2021), sans zone de vigilance. La cartographie des forêts sèches de Nouvelle-Calédonie (zone de vigilance) (CEN, 2021) comprend également une zone tampon, pour une surface totale de 31 481 ha (CEN, 2021). Pour plus d’information veuillez consulter le portail cartographique de l’ANCB sur le site géorep.nc
La forêt sèche est répartie sur du foncier public (47%), sur foncier privé (38%) et sur des terres coutumières (15%) du Nord et de l’Ouest calédonien. Plusieurs sites remarquables sont accessibles au public, en province Nord, la presqu’île de Pindaï qui abrite la deuxième plus grande forêt sèche du pays sur terrain public, et recèle de nombreuses espèces rares, en province Sud, le Domaine de Déva héberge le plus vaste ensemble de forêt sèche du territoire, aux faciès très variés, du littoral aux collines en passant par les formations rivulaires qui bordent les rivières et les creeks.
Découvrer ici les données cartographiques des forêts sèches de Nouvelle-Calédonie.
Le tableau de bord et les chiffres clefs des forêts sèches de Nouvelle-Calédonie
Caractéristiques de l’écosystème
La forêt sèche est un milieu original, qui a su s’adapter à des conditions de sécheresse très rudes.
D’aspect, la forêt sclérophylle forme un ensemble dense et fermé. Composée de petits arbres, d’arbustes, de nombreuses lianes et de quelques plantes herbacées, la forêt sèche prend toutefois des formes différentes, en fonction de sa position, proche du littoral, en bord de rivière ou sur les crêtes. On parle ainsi de faciès, ou de « forêts sèches » au pluriel, tant son aspect peut changer.
Pour survivre au manque d’eau, la forêt sclérophylle arbore un feuillage très caractéristique, destiné à limiter la perte par évapotranspiration. Les feuilles sont épaisses et dures, recourbées pour s’exposer le moins possible au soleil, vernissées et le limbe souvent réduit. Certaines plantes perdent leurs feuilles, comme le badamier de Poya (Terminalia cherrieri) dont le feuillage rougit puis tombe en saison sèche. D’autres espèces, au contraire, auront de très grandes feuilles persistantes, mais peu nombreuses. C’est le cas de la fontaine piment (Ixora margaretae), plante emblématique de l’écosystème forêt sèche.
Pour capter un maximum d’eau, les plantes de forêt sèche ont par ailleurs développé un réseau de racines important, en surface pour bénéficier des petites pluies, et en profondeur pour profiter de l’infiltration de l’eau dans le sol. Enfin, pour saisir les nutriments nécessaires à leur croissance mais aussi faciliter l’absorption de l’eau, les espèces de forêt sclérophylle ont su s’associer aux bactéries et champignons par relation de symbiose. On parle alors des nodosités et de mycorhizes, que de nombreuses plantes développent.
Pour plus d’information sur les forêts sèches découvrez ici la boite à outils pédagogique ou consulter la fiche synthétique du Vade-mecum « Qu’est-ce qu’une forêt sèche ?
Principales espèces
La flore
Lorsque l’on pénètre dans une forêt sèche, dans l’entremêla de lianes, on rencontre sans difficulté les espèces représentatives du milieu. On aura toutefois davantage de peine à observer certaines plantes endémiques et rares, dont une partie, micro-endémique, ne subsiste plus que sur une seule localité du territoire, en raison de l’extrême fragmentation de leur habitat.
Rappelons que la forêt sèche calédonienne est un écosystème d’une grande richesse.
Voici quelques-unes des espèces que vous pourrez observer dans une forêt sclérophylle :
Pour plus d’information sur les espèces des forêts sèches découvrez ici des extraits des guides de la flore des forêts sèches. Ces guides sont par ailleurs disponibles dans les librairies de Nouvelle-Calédonie.
La faune
En forêt sèche, la faune se fait discrète. Insectes, mollusques, reptiles et oiseaux sont pourtant nombreux à y habiter. Toutefois, les études spécifiques sur la faune des forêts sèches restent moins développées que celles sur la flore.
En se faufilant dans le sous-bois d’une forêt sèche, on pourra voir sans difficulté certains papillons, notamment le joli papillon bleu (Papilio montrouzieri), et plusieurs oiseaux comme le lunette, le petit lève-queue ou encore le sourd à ventre roux. Dans la litière, quelques espèces de scinques sont également visibles, au milieu de coquilles vides d’achatines (escargot envahissant) souvent présents en grand nombre. Avec un peu de chance, on apercevra aussi un ou plusieurs bulimes, cet escargot endémique à la coquille épaisse et dont l’ouverture ressemble étrangement à une oreille !
Voici quelques espèces animales que vous pourrez peut-être apercevoir :
Pour plus d’information sur les forêts sèches découvrez ici des extraits des guides de la faune des forêts sèches. Ces guides sont par ailleurs disponibles dans les librairies de Nouvelle-Calédonie.
Pour plus d’information sur les espèces et leurs caractéristiques biologiques et géographiques veuillez consulter le site de l’association Endemia, le site de l’herbier de Nouméa (IRD), le site de l’IAC (BDD ERM).
Protection réglementaire des espèces de forêts sèches
La protection de la flore :
52 espèces strictement inféodées aux forêts sèches sont protégées par les codes de l’environnement provinciaux (46 espèces en province Sud (Article 240-1) et 36 espèces en province Nord (Article 251-1)).
65 espèces à la fois présentes en forêt sèche et dans d’autres écosystèmes (forêt humide, maquis, savane…) sont également protégées (20 espèces en province Sud (Article 240-1) et 53 espèces en province Nord (Article 251-1)).
La protection de la faune :
De nombreuses espèces animales (avifaune, herpétofaune…) fréquentant les forêts sèches sont protégées par les codes de l’environnement provinciaux (Article 240-1) et (Article 251-1).
Parmi ces espèces protégées, quelques-unes ne se retrouvent qu’en forêt sèche ou dans certaines forêts du littoral : Nannoscincus hanchisteus (Scinque nain), Placostylus porphyrostomus (Bulime).
Pour plus d’information sur les espèces protégées et la réglementation associée, veuillez consulter les codes de l’environnement de la province Sud et de la province Nord.
Enjeux et menaces
Les forêts sèches demeurent les formations végétales les plus fortement menacées de disparition en Nouvelle-Calédonie. Les forêts sèches actuelles ne sont plus que les reliques d’une formation à l’origine beaucoup plus étendue. Nombreux sont les facteurs qui ont conduits à son déclin, et les menaces aujourd’hui perdurent.
Le défrichage
Agricole
Depuis fort longtemps, les terres de la côte Ouest ont eu une vocation agro-pastorale. L’installation puis l’augmentation des troupeaux d’élevage a demandé beaucoup de nouveaux espaces de pâturage, qui ont supposé le défrichage d’immenses surfaces de forêt sèche. Considérée encore à l’époque comme une formation broussailleuse et sans intérêt, la forêt sèche a vu sa surface se réduire considérablement, produisant un habitat profondément morcelé, tel que nous le connaissons aujourd’hui.
Urbain
L’expansion urbaine menace notamment les forêts sèches à proximité immédiate de zones fortement urbanisées, comme dans le Grand Nouméa. Par ailleurs, de petits fragments de forêt sèche subsistent encore au cœur des villes. Isolés dans le paysage urbain, ils jouent néanmoins un rôle important dans les connexions, échanges de graines et flux génétiques entre les lambeaux existants.
Les incendies
En Nouvelle-Calédonie, d’année en année plusieurs milliers d’hectares partent en fumée. Facteur de dégradation des forêts et d’érosion du sol, les feux sont la conséquence de comportements négligents ou d’actes de vandalisme. La forêt sèche, enclavée au milieu de savanes et de grandes étendues de gaïacs très combustibles, est une zone particulièrement sensible aux incendies.
Pour plus d’information sur les surfaces touchées par les incendies chaque année, consultez le portail cartographique Vulcain de l'OEIL et le tableau de bord des forêts sèches.
Les espèces exotiques envahissantes
Végétales ou animales, introduites par l’homme à des fins horticoles, nourricières ou domestiques, les espèces exotiques envahissantes ont eu pour effet de bouleverser les équilibres des écosystèmes locaux.
Pour plus d’information veuillez consulter les pages du pôle Menaces de l'ANCB (listes d’espèces envahissantes, stratégies EEE NC...).
Protection réglementaire des forêts sèches
Code de l'environnement de la province Sud :
Les forêts sèches disposent d’une protection particulière au titre de la protection des écosystèmes d’intérêt patrimonial (Titre III-Article 231-1 et suivants).
Pour plus d’information veuillez consulter le code de l’environnement de la province Sud.
Code de l'environnement de la province Nord :
Un titre IV visant la protection des écosystèmes a été réservé dans le code de l’environnement mais n’a pas fait l’objet de modification depuis 2008. Certaines espèces des forêts sèches sont protégées au titre du code de l’environnement (Titre V-Article 251-1).
Pour plus d’information veuillez consulter le code de l’environnement de la province Nord.
Protection réglementaire de sites de forêts sèches :
Certains sites abritant des forêts sèches sont classés en aires protégées au titre du code de l’environnement de la province Sud :
Parcs provinciaux:
Réserves naturelles :
Pour plus d’information sur les aires protégées et la réglementation associée veuillez consulter le site de la province Sud ou le code de l'environnement.
Certains sites abritant des forêts sèches bénéficient d'une protection au titre du code de l'urbanisme à travers la définition de zonages particuliers au sein des Plans d'urbanisme directeur élaborés par les communes.
Plus d’information sur les Plans d'urbanisme directeur consultez les sites de la province Sud et de la province Nord.
En Nouvelle-Calédonie, la compétence en matière d’environnement est dévolue aux provinces (loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999). Les services environnementaux de chaque collectivité sont en charge de la gestion, de la sauvegarde, de la protection et de la valorisation du patrimoine naturel. En complément des collectivités provinciales, d’autres acteurs publics (commune) ou privés (SEM, associations, propriétaires) interviennent dans la gestion des sites de forêt sèche en Nouvelle-Calédonie.
Conservation et gestion
Missions du pôle Terrestre de l’ANCB
Les missions du pôle Terrestre de l’Agence néo-Calédonienne de la Biodiversité, s'articulent autour de quatre objectifs principaux définis à la suite de l'évaluation du Programme de Conservation des Forêts Sèches (PCFS), réalisée en 2012, et validés par son conseil d’administration :
Accroître la superficie de forêt sèche protégée et gérée.
Développer les plantations de forêt sèche dans les sites protégés pour améliorer la résilience et la connectivité avec les écosystèmes à proximité.
Informer et sensibiliser les scolaires et le grand public, et les impliquer dans la conservation des forêts sèches.
Coordonner la stratégie de conservation des forêts sèches de Nouvelle-Calédonie et la gestion des sites prioritaires de forêt sèche.
Pour protéger et étendre les sites représentatifs des forêts sèches de manière suffisamment fiable pour permettre la conservation des habitats et des espèces, l’ANCB s’est fixée des objectifs ambitieux pour 10 ans, notamment : le doublement du rythme de protection physique des sites, en passant de 300 ha à 600 ha protégés physiquement ; et la multiplication par 10 des surfaces reboisées. Un objectif complémentaire est d'améliorer la maîtrise foncière des sites en parallèle du renforcement de la protection réglementaire.
Pour plus d'informations, et des chiffres clefs concernant les actions de protection et de restauration déployées à l'échelle de la Nouvelle-Calédonie, consultez le tableau de bord des forêts sèches.
Les démarches de conservation entreprises et coordonnées par le pôle Terrestre concernent notamment :
La prise en compte des forêts sèches dans l’aménagement du territoire avec une approche paysagère, par la mise à jour de la cartographie des forêts sèches en Nouvelle-Calédonie, l’identification des connectivités, l’intégration des enjeux de protection dans l’élaboration des plans d’urbanisme directeurs (PUD).
L’animation de groupes de travail à l’échelle pays pour coordonner la gestion des sites, améliorer la maîtrise foncière, actualiser le réseau de suivis scientifiques, protéger les espèces rares et menacées des forêts sèches.
L’élaboration et la coordination de plans de gestion de sites prioritaires, en collaboration avec les collectivités gestionnaires et les propriétaires terriens.
L’élaboration concertée de projets de restauration écologique de sites à fort enjeux.
Le développement de plantations pilotes à grande échelle sur la presqu’île de Pindaï (Pouembout) et sur le Domaine de Déva (Bourail) pour la mise au point de techniques de restauration efficientes pouvant être reproduites sur d’autres sites en Nouvelle-Calédonie.
La coordination d’un réseau de suivi scientifique des forêts sèches sur les sites prioritaires, et le suivi des toutes premières parcelles reboisées pour l’évaluation de l’état de la restauration après plus de 10 années.
La capitalisation et la diffusion des expériences de restauration écologique des forêts sèches par le biais d’un vade-mecum technique, en appui aux gestionnaires de sites, aux porteurs de projets de restauration et pour la mise à disposition des connaissances auprès du plus grand nombre.
L’élaboration de supports pédagogiques d’information (guide d’identification de la flore et de la faune des forêts sèches) et la coordination d’un programme de sensibilisation sur l’ensemble de la Grande Terre.
Pour plus d’informations sur les forêts sèches et les actions mises en œuvre pour les protéger, veuillez consulter les rapports d’activités de l’ANCB (et antérieurement du CEN), la page facebook ANCB Nouvelle-Calédonie et les documents mis en ligne.
Vous pouvez également contacter le pôle Terrestre via ce lien.
Mobilisation citoyenne
Outre les membres du comité technique forêt sèche animé par le pôle Terrestre de l’ANCB (d’autres acteurs néo-calédoniens se mobilisent pour la conservation des forêts sèches n’hésitez pas à les contacter pour vous investir près de chez vous pour préserver votre patrimoine !)
L’ANCB centralise les données issues des chantiers de restauration des forêts sèches mis en œuvre par les différents acteurs en Nouvelle-Calédonie, afin de partager les expériences, suivre l'effort de restauration à l'échelle pays et valoriser les contributions de chacun à la sauvegarde des forêts sèches.
Collectivités, associations, entreprises et particuliers sont invités à remplir la fiche de renseignement spécialement conçue pour faciliter la transmission des informations, et ce pour chaque chantier de restauration.
Cette fiche de renseignement est téléchargeable dans la rubrique Documents. Elle est à renvoyer complétée au pôle Terrestre, aux adresses suivantes : coord.poleterrestre@ancb.nc et adj.poleterrestre@ancb.nc.
La synthèse des informations communiquées à l’ANCB a notamment permis la publication, en 2019, du vade-mecum de la restauration écologique des forêts sèches.
L'ensemble de ces informations sont également valorisées dans le tableau de bord des forêts sèches.
Plantations au Domaine de Déva